Doit-on s’attendre à d’autres révélations sur des dirigeants algériens ?

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Le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ) en partenariat avec plus d'une centaine de journaux a commencé, hier dimanche, la publication de révélations sur le plus grand scandale d'évasion fiscale dans le monde. Sur une liste de pas moins de 140 personnalités internationales impliquées, figure le nom de Abdeslam Bouchouareb...

Le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ) en partenariat avec plus d'une centaine de journaux a commencé, hier dimanche, la publication de révélations sur le plus grand scandale d'évasion fiscale dans le monde. Sur une liste de pas moins de 140 personnalités internationales impliquées, figure le nom de Abdeslam Bouchouareb, ministre de l'Industrie et des Mines. Dans cet entretien, Djilali Hadjadj, porte-parole de l'Association algérienne de lutte contre la corruption (AACC), revient sur ces enquêtes et l'éventuelle implication d'autres dirigeants algériens dans le scandale.

Est-ce que Bouchouareb est le seul dirigeant algérien impliqué dans le scandale ?

Dans ce domaine, il faut dire que c'est un amateur. D'autres dirigeants algériens, plus futés et plus malins que lui, ne sont pas identifiables par leurs noms et créent des comptes offshores numérotés. Je vous rappelle que les commissions versées dans le cadre du projet de l'autoroute Est-Ouest sont principalement domiciliées au Panama par l'intermédiaire d'une banque suisse. Parmi leurs détenteurs, Mohamed Bedjaoui (ancien président du Conseil constitutionnel) et Pierre Falcone.

Est-ce pour cette affaire que Bouchouareb vous a envoyé un intermédiaire ?

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    L'intermédiaire envoyé par Abdeslam Bouchouareb avait exprimé la crainte du ministre concernant l'éventuelle médiatisation d'une affaire le concernant. Le fait qu'il soit en état d'alerte et qu'il craigne des divulgations est significatif dans son implication. J'ai répondu à l'intermédiaire qui est le PDG d'un grand groupe public que ce ministre est un imbécile. Pourquoi a-t-il peur d'éventuelles divulgations de l'association s'il n'avait rien à se reprocher. L'intermédiaire me disait également que le ministre me rappelle qu'il est issu d'une famille révolutionnaire. Je peux considérer cette manière de faire comme étant une démarche d'intimidation à mon égard !

    Peut-on remonter vers les véritables détenteurs des comptes numérotés ?

    On ne peut pas remonter vers les détenteurs s'il n'y a pas d'enquêtes judiciaires approfondies.

    Pourquoi avez-vous été sollicité dans le cadre de cette enquête sur le « Panama papers » ?

    J'ai été sollicité par des journalistes qui font partie de ce réseau et qui voulaient en savoir plus sur l'affaire Sonatrach-Saimpem-Eni. Ils m'ont interrogé sur l'implication de Chakib Khelil et de Farid Bedjaoui. Ils voulaient en savoir plus sur les techniques utilisées pour transférer des pots-de-vin et les commissions, notamment les fameux 200 millions d'euros à travers les centres offshores. Ils semblaient avoir de nouveaux éléments sur l'affaire Saimpem-Eni-Sonatrach.

    Doit-on s'attendre à des révélations sur d'autres dirigeants algériens ?

    Ces journalistes ont la certitude qu'il y a d'autres dirigeants algériens qui ont des comptes numérotés. Dans les emails sur lesquels ces (mêmes) journalistes ont travaillé, il était question d'ouverture de comptes pour des dirigeants algériens à travers des intermédiaires qui sont des avocats et des gestionnaires de fortunes domiciliés en Suisse. Je voudrai également revenir sur les biens à l'étranger acquis par des dirigeants algériens cités dans ces affaires « offshore » et/ou de corruption, ou en cours d'enquêtes judiciaires, notamment à Milan pour ce qui est du dossier Saipem-Sonatrach-Eni. Ces biens, immobiliers et comptes bancaires, sont souvent à proximité physique de paradis fiscaux. À titre d'exemple, la domiciliation de certains biens de Chakib Khelil et de Farid Bédjaoui dans l'État du Maryland n'est pas le fruit du hasard.

    Pourquoi ces biens se trouvent dans l'État de Maryland ?

    Le Maryland est limitrophe de l'État du Delaware qui est un paradis fiscal situé au cœur des États-Unis. Il y a quelques jours le président américain Obama annonçait sa décision de supprimer le paradis fiscal du Delaware. Il faut rappeler que du temps où il était sénateur, Obama, juriste de formation, avait été le co-auteur d'un projet de loi contre les paradis fiscaux. Est-ce à dire que cette décision d'Obama est le résultat d'une volonté politique de la 1ère puissance mondiale de ne plus abriter des « Biens mal acquis », notamment par des dirigeants étrangers sur le sol américain ? Ce qui pourrait conforter l'hypothèse que Chakib Khelil n'était plus désirable aux États-Unis ?